Luc 2,1-20(21) « Pour Dieu tout enfant est légitime, quoi qu’il lui soit arrivé, à lui ou à sa maman » ; notes exégétiques et homilétiques (commentaire)

La visé éthique ultime ? Une fois là, on n’a plus de choix : il faut être là !

Luc 2,1-20 ; le texte (TOB)

Approfondissement de Luc 2,1-20 (4-16) : « Trouver un place dans le monde et dans le cœur des humains »

(avec la TOB (Traduction œcuménique de la Bible) ; André Chouraqui ; Loucas, Evangile selon Luc ; JClattès, 1993 ; François Bovon ; L’évangile selon saint Luc ; Commentaire du Nouveau Testament IIIa, Labor et Fides, Genève 1991)

2,1-5 comme introduction à 2,6-20

« Pas un mot de la naissance virginale ni de la conception par le Saint-Esprit ; Joseph et Marie sont là, un couple comme les autres. » (F. Bovon)

Le recensement (v. 1-5) et la naissance de Jésus (v. 6.7) : contraste entre l’empereur connu de tous et le messie caché.

« L’épisode des bergers veut moins prouver qu’attester une révélation du ciel. » (Bovon)

 Tout enfant est une enfant du ciel.

Le recensement :

  • la proclamation de l’écrit (v. 1.2)
  • son application (v. 3)
  • la cas particulier de Joseph et Marie (v. 4.5)

« Sur l’arrière-plan de l’édit impérial, l’annonce par les anges de la naissance du « sôter », « Sauveur », et du « kurios », « Seigneur », prend tout son poids. En affirmant que le salut a lieu dans l’histoire, elle prend une couleur politique … En même temps, la polémique de Luc vise, par son insistance sur l’obéissance de Joseph et de Marie, les mouvements zélotes. Luc ne fait pas jouer une théologie politique contre une autre. Son Evangile est une critique et de l’idéologie des princes et de celle des Zélotes.

Le lecteur moderne ne saisit plus guère l’importance pour le pouvoir d’un recensement : le monarque voulait connaître le nombre de ses sujets pour les plier à ses exigences militaires et fiscales. » (Bovon)

Le monarque aujourd’hui ?

L’État et le peuple lui-même, qui se prend pour Dieu : « la démocrature ».

Aussi, le pouvoir des chiffres (« données ») n’était jamais aussi grand qu’aujourd’hui. Tout est mesuré, « recensé ». Et en l’argent tous chiffres se concentrent ; tout est finalement chiffré. Y résister est invoquer un autre Dieu (absolu) ; ici se propose celui qui s’inscrit pleinement dans l’interdépendance humaine et naturelle. L’histoire de Noël selon Luc n’est pas seulement sociale, mais aussi écologique ; elle est d’une autre économie.

*to dogma », signifie d’abord « l’opinion » ; puis « la disposition, le décret, l’édit » ; enfin « la formule doctrinale, le dogme » (Bovon)

v. 4.5 Pourquoi Bethléem ?

Les recensements se font toujours au lieu du domicile et non au lieu d’origine (Bovon) :

« ‘Bethléem’ est historiquement aussi incontrôlable que la résurrection. »

 « Bethléem », serait-ce le « Je suis le pain » lucanien ?

« N’essayon pas d’adoucir ce qu’a de choquant cette finacée enceinte en voyage. Luc a provoqué le choc. » (Bovon)

v. 5 « son épouse » : Marie est la femme de Joseph et non sa fiancée, tout simplement

« Marie est légalement mariée à Joseph …, mais ils ne mènent pas encore la vie commune. La coutume juive prévoit en effet un délai avant que l’époux introduise son épouse dans sa maison. » (TOB)

Et si vous voulez parler de la naissance virginale, alors parlons des enfants dits « illégitimes », comme Jésus. Pour Dieu, tout simplement, il n’y a pas d’enfants illégitimes. Pour Dieu, tout enfant est légitime, quelque soit son origine.

 v. 6.7 Joseph et Marie sont là. La destination est atteinte est les jours « accomplis ».

L’enfant est  !

Le fait d’être là comme ultime visée éthique.

« Être là » est accomplissement (et initiation, donc départ et arrivée).

 « … ce qui s’accomplit, ce n’est pas un temps biblique, liturgique, sacré …, mais un événement tout naturel et humain. » (Bovon), donc pas un temps d’Église, mais universel.

 F. Bovon parle de « réalisme de l’incarnation » et cite un poème de Kurt Marti (p. 120):

 « En ce temps-là

où Dieu

criant en naissant

a brisé les images de Dieu

où entre nles cuissent de Marie

tout rouge et tout ridé

l’enfant est là. »

v. 7 « salle d’hôtes », même terme qu’en 22,11 pour la salle de la dernière cène.

« relais » (Bovon), « salle commune » (Chouraqui)

 v. 7b « kataluma », « étape, relais, gîte pour la nuit », …

 « … n’est pas une hôtellerie … il y a un autre mot pour cela …

C’est un endroit où on peut faire halte, dételer son animal de selle ou de trait (déposer ses bagages ? « kataluô », « détacher, dételer »), où l’on peut à la rigueur passer la nuit … A mon avis, il s’agit d’un local dans une maison privée o`les voyageurs pouvaient passre la nuit. » (Bovon)

v.8

« Les bergers sont alors mal vus en Israël, car ils vivent en marge de la communauté pratiquante. Ce sont des petits, des pauvres. » (TOB)

v. 11 La fonction sotériologique de Jésus :

 « L’histoire des bergers est une annonciation : un message angélique à contenu sotériologique accompagné d’un signe. » (Bovon)

Tout enfant est un signe du salut. La conversion, le retournement est un mouvement vers l’enfant qui nous habite (8,15-17) … Tout être humain est un signe du salut.

Donc : ce n’est pas l’enfant qui nous sauve, mais l’enfant qui habite en nous.

v. 13.14

« Le sens de l’épisode : c’est l’œuvre d’amour de Dieu qui associe la terre au ciel. » (Bovon)

Quand il s’agit du sens nous sommes dans le spirituel.

  • Dans notre vie, comment associer la terre au ciel ?
  • Donner sens à la (nouvelle) vie, aux enfants, à l’enfant qui naît.

La réalisation de soi, « le salut », est une réalisation de l’enfant qui naît en nous ; vivre est faire naître l’enfant en nous. Le lieu en est la mangeoire, la crèche de toute la création. Cependant, le chemin passe par le Christ (messie1 ; « laissez venir les enfants à moi »), la croix et la résurrection (et non l’Église).

 v. 15 Litt. « Voyons cette parole qui est arrivée » (TOB)

« Voyons l’événement qui est advenu » (Chouraqui)

Une parole qui est événement et un événement qui est parole.

Noël le 25 décembre, au solstice d’hiver selon le calendrier julien.

v. 9 « ils frémissent d’un grand frémissement » (Chouraqui), « grande crainte » (TOB)

« Non pas de peur, mais d’éblouissement en face du sacré. Il n’est aucune frontière entre le monde naturel et le monde surnaturel dont il émane : les bergers sont attentifs au message qu’Adonaï leur transmet par l’intermédiaire de ses anges, l’annonce de la naissance du messie. » (Chouraqui)

 L’ange, les anges, avant rendre gloire à Dieu, rend(ent) d’abord témoigange à cet être humain.

v. 10 « je vous annonce », « euangelizomaï »

L’annonce de tout enfant est une bonne nouvelle.

v. 12 « le signe » :

  • la mangeoire, berceau de fortune
  • la naissance même de l’enfant nouveau-né

 Signe de quoi ?

 « il est né pour vous aujourd’hui un saveur, c’est le messie … »

 Du messie, du salut ?

 L’enfant est né … quand l’enfant naît … en nous ?!

v. 14 « ses bien-aimés »

Litt. « pour les hommes (objet) de (sa) bienveillance » (TOB)

Les hommes qui sont objet de la bienveillance.

« Paix et bon vouloir sur terre pour les hommes », « Paix sur terre aux hommes en qui Adonaï se plaît » (Chouraqui)

Paix sur terre et bienveillance de Dieu aux hommes

Paix sur terre aux hommes en qui Dieu se plaît, se reconnaît

Dieu, se reconnaît-il en tout homme ? … l’enfant du v. 10 …

Le maintien de la toute-puissance divine comme un abus de pouvoir de la part de l’Église !?

v. 21 Jésus est juif, tout simplement ; le huitième jour après sa naissance il entre dans l’alliance d’Abraham.

« Enfant juif, Jésus est intégré au peuple de la promesse : il reçoit le signe de la fidélité de Dieu et de son alliance avec Israël, la circoncision. … Dieu veut que Jésus s’appelle Jésus et devienne, par là-même, ce que ce nom décrit. » … signe incarné …

 Jésus est signe, signifiant et le signé … Il est « la chose » ; l’enfant l’est !

v. 21.22 Apparemment un doublon ?

v. 21 « on le nomme »

v. 22 « on l’amène … pour le présenter … », à celui qui l’a déjà nommé (1,31), une consécration :

« Tout mâle ouvrant le sein sera appelé saint pour le Seigneur. » (TOB note p) ; Ex 13,2.12.15)

Armin Kressmann 2013

1Qui est caché (« pas de place pour eux » v. 7) ; cf. aussi Matthieu 11,2-11(15) – « Attendre des miracles est faire violence à Dieu »

 

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