« Soyez parfaits comme je suis parfait ! » Dit Dieu. Exigeants. De la personne croyante ou en quête de spiritualité on attend plus que de la morale de base. (Elio Jaillet sur Facebook, suite à une prédication de Sophie Maillefer sur 1 Corinthiens 3,16-23 et évangile selon Matthieu 5,38-48)

Quelques remarques :

Pourquoi toujours cette traduction statique, la perfection, là où le mot en grec vise une finalité, est une visée, un accomplissement, comportant en lui-même une passivité ouverture à la grâce de Dieu ? Ensuite, matière à réfléchir, mais c’est peut-être la même chose, quand on parle de perfection, pour la bible celle-ci s’accomplit (pléonasme ?) sur la croix (« Tout est achevé. » le même mot, en grec Jean 19,28.30). Redoutable. Enfin, Jésus, en Matthieu 5,48 dit, selon la TOB : « Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfaits. » Cependant, quand celui-ci parle, lui, le Père, selon nos Écritures, il n’est pas question de perfection, mais de sainteté (Lévitique ; 1 Pierre, là une promesse : « Soyez saints, car je suis saint. » un futur que je sache, « heilig sollt ihr sein »). Tout autre chose que la perfection, me semble-t-il. A discuter. Pourquoi donc toujours cette « perfection », réalité mortelle qui fait tellement de mal ? Inaccessible comme elle est pour l’humain, si ce n’est qu’au moment de la mort, elle ouvre la porte à la prise de pouvoir sur ceux et celles « qui ne sont pas parfaits », « obéissant », se « soumettant » à ceux qui « définissent, gèrent et administrent la perfection », donc les « imparfaits » selon les intérêts et définitions des puissants, notamment les femmes, cf. une certaine mariologie, ou les homosexuels… et par là à toute sorte d’abus spirituels, moraux, psychiques et même physiques. Où est la grâce, quand nous devons être parfaits ?

Et Elio Jaillet réagit :

Je te rejoins sur tes questions et la perspective critique sur la perfection : crise de l’idée régulatrice ? Ou justement : recentrement de sa fonction à partir d’une dramatique concrète. La perfection n’a pas sa fin en elle-même, mais en Dieu – et Dieu ne se définit pas par la perfection, mais sur la croix. C’est sur la croix que Dieu révèle sa sainteté – et du coup sa perfection. Perfection indisponible – perfection qui oriente parce qu’elle se refuse à toute saisie de l’orientation ? Asymptote de la perfection ? Après la perfection la Loi (Rm 3) et avant, l’amour ?

Je réponds :

Romains 3! Tout l’enjeu, la justification par la foi,… et les chrétiens, dans leur histoire, mon histoire, notre histoire, avons fait de la foi une loi. Nous n’en sortons pas, nul, de notre aspiration de nous justifier par nos efforts, Paul le dit. Donc, comment lire Romain 3, perfectionnement en Dieu en qui je crois, « asymptotique », « sanctification », donc de nouveau perfectionnement spirituel, aspiration, ou rupture radicale, croix, don, gratuité, mort de la loi, du poids de la loi, changement de niveau, qui change aussi le rôle de la loi, et celui de la foi. Mort de la foi (comme effort). Mort de la foi. Personnellement j’opte pour cette rupture, en faveur de cette liberté que Dieu nous accorde, accomplie paradoxalement par et en la croix (enjeu herméneutique), liberté non pas pour faire n’importe quoi, comme Paul le dit aussi, mais liberté de faire joyeusement le bien, librement, sans aucune obligation de le faire, par simple plaisir. Et laisser le reste à Dieu. Soyons libres de faire le bien, par la foi, ou sans elle, ça n’a aucune importance, aussi longtemps que nous le faisons, sans aucune obligation qui, elle, nous soumettrait de nouveau à la loi. Le chrétien est un hors-la-loi, libre de faire le bien. Mais il ne peut pas faire autrement. C’est un accro… accro de vie, de liberté, du bien, d’amour, de bienveillance, d’empathie, de Dieu. La gloire à Dieu, le plaisir, de bien faire, à l’homme. Le salut est hors Église. Confession de foi.