« Handicap », le terme ; définition, étymologie, histoire, progression

Citations extraites de l’ouvrage de Claude Hamonet, Les personnes handicapées, coll. Que sais-je ?, PUF, Paris 1990, pp. 3, 7-9.

Les termes « handicap » et « personnes handicapées » sont d’apparition relativement récente. Ils ont progressivement supplanté d’autres termes tels que: « infirme », « invalide », « paralysé », « mutilé », « débile », aussi bien dans le discours quotidien que dans les discours juridique, médical et social …

Pour mieux comprendre la progression de la notion de handicap, il est intéressant de retrouver les origines et les évolutions sémantiques de ce terme qui évoque, aussi, l’idée de hasard, de jeu, de compétition, de performance…

Il est un fait que le parcours de cette contraction de trois mots de la langue anglaise : « Hand in (the) Cap » (la main dans le chapeau ou la casquette), est remarquable.

D’un jeu de hasard aux courses hippiques puis au golf. – C’est au XVIe siècle, en Grande-Bretagne, qu’on le rencontre pour la première fois (1).

Il sert à désigner un jeu dans lequel les partenaires se disputent des objets personnels dont le prix est fixé par un arbitre. Chacun mise dans un chapeau.

C’est en 1754 que le mot est appliqué à la compétition entre deux chevaux puis en 1786 à des courses de plus de deux chevaux.

Le Dictionnaire Robert explique le passage du premier sens (celui du jeu) au deuxième sens (celui de la compétition entre des chevaux) par le rôle de l’arbitre

qui apprécie la valeur comparée des « objets » : effets personnels puis chevaux.

En 1827, le terme traverse la Manche avec la terminologie spécifique des courses de chevaux telle qu’elle est référencée par T. Bryon dans son Manuel de l’amateur de courses: « Une course à handicap est une course ouverte à des chevaux dont les chances de vaincre, naturellement inégales, sont, en principe, égalisées par l’obligation faite aux meilleurs de porter un poids plus grand. »

C’est avec ce sens qu’il est mentionné dans le supplément du Littré édité en 1877 et dans l’édition de 1935 du Dictionnaire de l’Académie.

Un autre domaine de la compétition a adopté le terme « handicap » pour classer les joueurs selon leurs performances, c’est le golf.

Très tôt apparaissent des dérivés: handicaper (1854), handicapeur (terme désignant le commissaire qui détermine les handicaps) (1872), handicapage (1906).


De la limitation des aptitudes des meilleurs chevaux à celle des capacités humaines. – Il est difficile de dater la période de l’extension du sens du mot

« handicap » à celui de conséquence d’une limitation des capacités humaines, physiques ou mentales. Il semble que cette évolution soit tardive, en tout cas postérieure à 1906.

L’apparition du terme de « handicap physique » est datée de 1940 par le Robert. Il est probable que ce glissement sémantique se soit d’abord fait dans les pays de langue anglaise (les Etats-Unis surtout) et ait progressivement été repris en langue française.

Les linguistes font noter que l’on ne fait pas la liaison avec le H de handicap lorsque l’on parle des handicaps mais qu’on le fait volontiers lorsqu’on évoque les handicapés.

« Handicap », « handicapé » et « handicaper » figurent maintenant dans tous les dictionnaires de la langue française avec un double sens. Il en est de même du dictionnaire anglais-français Harrap (2).

« Le sens originel de l’anglicisme « handicap » est, bien entendu, celui d’une course où l’on rétablit par un artifice les inégalités naturelles. Par la suite, la notion d’égalité devrait dominer, mais c’est celle de désavantage qui l’emporte : « entendez désavantage dans une concurrence ».

« L’idée de concurrence s’est effacée peu à peu et la sonorité sèche du mot achève de lui donner une nuance défavorable. On entend couramment des phrases de ce genre : « Il a eu un accident d’auto et le voilà très handicapé. »

« Certes, on pense encore que c’est une infériorité dans la lutte pour la vie que d’être infirme ou malade. Mais le glissement du mot est incontestable et il est à ranger sous la rubrique des anciens anglicismes, ceux qui ont cessé de l’être »

(A. Thérive, Querelles de langage,1940).

Le fait que la « sonorité sèche » de ce terme est mentionnée mérite d’être souligné. Ceci ajouté à son origine anglaise pour contribuer à désigner un fait, une situation à caractère différent, non ordinaire, « hors normes ».

1. Dictionnaire des anglicismes, p. 376-377; Dictionnaire Robert, 1984.

2. Dictionnaire des anglicisems, Dictionnaire Robert, 1984; Harrap’s shorter, Dictionnaire anglis-français, London, Harrap Limited, 1984

Texte catéchétique faisant partie d’une série publiée en 1999 lors du centenaire de la Fondation Eben-Hézer, fondée par Julie Hofmann :

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