En situation de handicap ! Qui ?

Je suis en Allemagne, à Cologne pour être précis. Ce matin mon projet est de partir à Essen. Je me trouve donc à la gare principale, à 10h30, et le train que j’ai l’intention de prendre part à 10h47. A l’automate pour tirer un ticket je parviens à executer une bonne douzaine d’étapes, jusqu’au paiement ; ici, la machine refuse mon billet de 50 euros. Un homme, handicapé, avec un déambulateur, un « tintébin », comme nous disons en Suisse, se  tient à côté de moi et m’approche : « Vous voulez vous rendre à Essen ? Vous pouvez m’accompagner ; en tant que personne en situation de handicap j’ai droit à un accompagnateur, gratuitement, voici ma carte officielle. » J’entre en matière, pourquoi pas. Le prochain train part à 10h37, mais quand nous arrivons sur le quai il est parti ; donc changement de quai pour prendre le train que j’avais intialement prévu, départ 10h47 ; un moment pour entrer en discussion : « Vous venez d’où, vous allez où ? etc. » Et je comprends enfin que mon compagnon fait chaque matin quelques déplacements pour « améliorer sa rente ». « Si vous me donnez 5 ou 10 euros, chacun de nous deux en tire son profit. » Quand je lui demande ce qu’en pense la Deutsche Bahn, il me répond : « Je n’ai pas le droit, mais jusqu’à présent ils ne m’ont pas rattrapé. » Je décide alors de me chercher un ticket, mais j’affirme à mon compagnon de revenir, de faire quand même le trajet avec lui et de lui donner son « dû ». « Attendez-moi ici, je reviens tout de suite, promis. » Je redescends et me remets devant un automate. La répétition des opérations me mène au même résultat, la machine refuse mon argent. Alors, m … C’est un signe ! Je vais profiter de l’offre insolite. Je cours, le train est là, mais plus mon compagnon, ni sur le quai, ni dans le train. Pas de ticket, pas d’assurance d’une personne handicapée à accompagner non plus, je dois laisser partir mon train. En conséquence, je tente une nouvelle fois ma chance, pour apprendre par une autre voyageur que la machine refuse des billets en-dessus de 20 euros si le montant du ticket en est inférieur. Avec mon billet de 50 euros, changer ou guichet, c’est la question. Voyant des fils d’attente autant devant la banque d’échange que du côté des guichets ne me reste que l’achat de chiclettes, d’un paquet de chewing gums. Retour à l’automate, nouvelle tentative, et voici un homme à côté de moi, un autre, plus jeune, un peu « stoned » comme disent les jeunes à Cologne . « Je dois aller à Dortmund, me manquent juste un euro et 60 cents. » « Attendez, d’abord mon ticket, puis votre souci. » Le jeune homme attend, patiemment, m’aide même à trouver le bon train, ce qui, pour un petit Suisse comme moi, n’est pas évident chez le « grand frère ». Avec les va-et-vient, après 18 étapes, – je les ai comptées -, je réussis, mon ticket sort de la machine ; mon nouvel interlocuteur mérite son argent. Le train arrive, sur un autre quai que celui qui a été annoncé par haut-parleurs. Enfin, dans le train, celui de 11h10, le conducteur, quand je lui fais part de mes épreuves, me dit : « Vous auriez pu acheter votre ticket chez moi. » Une heure plus tard, à Essen, enfin, dans le hall de la gare, un jeune homme m’interpelle : « Nous sommes trois avoir dormi à la belle lune; il pleut, et pour trouver un lieu sec pour la prochaine nuit nous manquent juste 8 euros … » En siutation de handicap ? Qui ?

Armin Kressmann 2011

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