« Comme il faut apprendre à vivre ensemble, il faut apprendre à penser ensemble. » (Théophile Spörri)

« Comme il faut apprendre à vivre ensemble, il faut apprendre à penser ensemble.

Penser en commun n’est pas faire un mélange de toutes les idées qu’un groupe met en commun, un vague compromis entre les différentes manières de penser.

Penser dans la communauté est d’abord un exercice de solitude, c’est un obstacle, un poids qui fait descendre chacun au plus profond de lui-même.

Il faut d’abord avoir le courage de penser contre tous ses camarades, d’être seul de son opinion, de se sentir noyé avec sa pauvre vérité personnelle au milieu d’une masse hostile.

Il faut avoir ensuite le courage de défendre son point de vue et tenir bon au nom de la lueur qu’on a cru entrevoir.

… penser en commun c’est le choc douloureux et dramatique des vérités incarnées dans des personnes réelles. Plus le choc est violent et plus fort jaillit l’étincelle qui éclaire le paysage humain.

C’est dans ces rencontres, où l’on cherche péniblement à exprimer devant les autres ce qu l’on sent au plus profond de soi, que l’on découvre des choses que l’on n’aurait jamais pu trouver dans la méditation solitaire la plus recueillie.

Et ce sont ces idées qui, sans les unifier, unissent les hommes. Une pensée synthétique n’est pas une pensée qui met les autres de côté et les supprime, mais une pensée qui est assez forte pour se maintenir en face des autres jusqu’à ce que chaque vérité ait trouvé la place qui lui revient.

La pensée communautaire est polyphonique.

On a trop longtemps pensé en manichéen : toute la lumière est d’un côté, toute l’ombre de l’autre.

Il faut voir que chaque lumière a son ombre, chaque vérité son mensonge.

Tout se tient, il n’y a pas de vérités séparées.

Le faux c’est précisément ce qui sépare – comme ce genou de Ch. Morgensten qui se promène tout seul par le monde.

Il faut voir l’ordre de tout.

Chaque vérité prendra alors sa place et les hommes, en pensant ensemble, auront appris à vivre ensemble.

‘Tu aimeras Dieu de toute ta pensée’ ne va pas sans l’autre :

‘Tu aimeras ton prochain comme s’il était toi.' »

Théophile Spörri, in : Roger Schutz; Introduction à la vie communautaire ; Labor et Fides, Genève 1944, p. 7s

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