(avec la TOB (Traduction oecuménique de la Bible) ; André Chouraqui ; Loucas, Evangile selon Luc ; JClattès, 1993 ; François Bovon ; L’évangile selon saint Luc ; Commentaire du Nouveau Testament IIIb, Labor et Fides, Genève 1996)
La tournure de 9,51 « comme arrivait le temps où il allait être enlevé du monde, Jésus prit résolument la route de Jérusalem … » ouvre une perspective de voyage et une remise aux disciples (les soixante-dix ou -douze ; 10,1ss), donc un envoi en mission (9,52-10,20)
La prière est au centre comme lieu de la rencontre avec le Père1 :
« Qui n’est pas contre vous est pour vous » (9,50)
9,52ss Mission
10,21ss La révélation aux petits
10,25ss L’amour et le commandement d’amour
Le prochain
10,38ss Marthe et Marie
11,1ss La prière « Père ! »
11,5ss L’ami et la demande
11,14ss Jésus – Béelzéboul ?
La rechute
11,27s Le vrai bonheur : l’écoute et l’observance de la parole de Dieu
11,29ss Le Fils de l’homme – un signe
« Qui n’est pas avec moi est contre moi » (11,23)
Pour F. Bovon, Luc 11,1-4, le « Notre Père » lucanien, est un formulaire.
« Le Notre Père dit Dieu pour mieux dire la condition humaine. » (p. 114)
Trois péricopes sont associées au rappel de la Loi (10,25-42) :
- (Notre) Père
- L’ami insistant
- L’invitation à demander
Une pratique catéchétique traditionnelle.
Avec Marie (10,38-42), une invitation à prier. Qu’est-ce donc la prière ?
Écouter et aimer Dieu, avec Marie ? La bonne (F. Bovon) ou la meilleure (TOB) part (10,42) ?
Si c’est la bonne, avec F. Bovon, l’autre n’est pas bonne.
Si c’est la meilleure, l’autre pourrait aussi être bonne.
Invoquer Dieu, ici avec les disciples ?
Et Marthe ? Le service et le sens du service ?
Le (Notre) Père, une construction pyramidale :
au sommet le seul Père
ensuite ses deux biens, son nom et son règne,
enfin nos trois réalités, le bon pain, les fautes pardonnables et la tentation ou l’épreuve (finale).
« Les cinq demandes de cette prière constituent le fond commun des liturgies chrétienne et hébraïque. » (A. Chouraqui)
Absence d’une christologie explicite (F. Bovon) ; par contre, dans une perspective inductive, donc existentielle, très présente : le minimum vital (le pain), la rupture du lien (la faute) et le sens de la vie (l’épreuve). Dans cette prière, en Jésus-Christ, entre l’invocation du Père et la mise en épreuve (« mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »), il y a le cercle herméneutique existentiel de la condition humaine par excellence. Chez Luc, l’absence du collectif, « Notre Père », (donc de la dimension liturgique), renforce cette dynamique. Là où le « notre Père » de Matthieu est liturgique, le « Père » de Luc est personnel.
Trois visées :
- La formation catéchétique
- La prière personnelle
- La liturgie dominicale
v.1 « quelque part », « un jour » Que signifient ces remarques d’apparence anodine ?
Un jour, quelque part, ici chez nous ou ailleurs … avec le Christ en prière !? … « Père ! »
v. 2 « Père »
« Que ton nom soit sanctifié » (Bovon)
« Fais-toi connaître comme Dieu » (TOB …)
« Fais-toi reconnaître comme Dieu » (TOB 1987)
« Fais connaître à tous qui tu es » (TOB 1988)
« Ton nom se consacre » (Chouraqui)
« Que la sainteté de ton nom soit reconnue » (français courant 1989)
« Que tous reconnaissent que tu es le Dieu saint » (français courant 1997)
« Que la sainteté de ton nom soit respectée » (Second 21)
« Ton nom est saint. Fais que tout le monde le reconnaisse. » (français fondamental)
« Montre à tous que tu es Dieu » (Les 4 évangiles au présent)
La diversité de ces traductions nous montre :
- Le double caractère de l’invocation, objectif (une attente à l’égard de Dieu) et subjectif (une attitude ou action humaine).
- Le paradoxe entre la connaissance et l’impossibilité de connaissance de Dieu.
- L’affirmatif et l’impératif (avec Dieu, ce qui devrait être est).
- Consécration, donc appartenance, est sainteté et vice versa.
« Père », vocatif, grec « pater », araméen « abba »
Invocation de Dieu comme « mon Père » ou « abba – papa »
« Le Dieu de Jésus chérit non seulement l’ensemble du peuple, mais chacun de ses membres, homme ou femme. » (F. Bovon, p. 119)
v. 2b
« Le ‘nom’ n’est pas un mot humain, fût-ce celui de ‘père’, mais, dans une tradition biblique et un milieu oriental qui ignore le nominalise, la réalité même de Dieu. A cette précision près qu’il s’agit de Dieu en communication avec l’extérieur. La première requête demande que cette manifestation soit enfin reconnue. Qu’un impératif soit utilisé signale l’attente et l’espérance … Que l’impératif soit un passif implique que cette reconnaissance doit être activée. D’abord par Dieu lui-même … ; puis par les médiations eschatologiques qu’il voudra bien engager. La requête peut, aux yeux de Luc, recevoir dès maintenant des anticipations … Dire ‘que ton nom soit sanctifié’, c’est donc entrer dans le jeu de Dieu, et s’attacher à la figure que prend ce nom dans l’histoire et dans la vie … Cette requête dévoile quelque chose sur Dieu, mais elle renvoie aussi à ses vis-à-vis humains. » (F. Bovon, p. 120)
« agiazô », c’est « rendre saint », mettre à part pour la divinité.
« Le ‘règne’ de Dieu … est déjà partiellement et mystérieusement présent. Il est l’objet d’une proclamation, qui est bonne nouvelle … parce qu’il n’est pas condamnation, mais rétablissement du droit et délivrance des opprimés. » (p. 121)
v. 4 « dette » – « péché »
« dans l’épreuve » (Chouraqui) – « dans la tentation » (TOB, Bovon)
« et ne nous fait pas pénétrer dans l’épreuve »
v. 5ss
« Le pain, le poisson et l’œuf constituent le fond de l’alimentation du pays comme la pierre, le serpent et le scorpion à sa nature. La leçon à en tirer : ne pas craindre d’insister jusqu’à l’importunité pour forcer les portes du royaume. » (Chouraqui)
« Mind map » de la prédication sur Luc 11,1-4 du 4.8.13 à la chapelle de l’Institution de Lavigny
Armin Kressmann 2013
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1 Sur la notion du « Père » cf. « Père ! De Dieu vers Dieu », notes sur la même péricope