Luc 10,1-11(12) Quand paix rencontre paix il y a Règne de Dieu

Luc 10,1-9 (11) – Lc 10,1-9 Prédication « Quand paix rencontre paix il y a Règne de Dieu » (Armin Kressmann, EERV Cathédrale de Lausanne 3.7.16)

(avec la TOB (Traduction oecuménique de la Bible) ; André Chouraqui ; Loucas, Evangile selon Luc ; JClattès, 1993 ; François Bovon ; L’évangile selon saint Luc ; Commentaire du Nouveau Testament IIIb, Labor et Fides, Genève 1996)

Pour F. Bovon la péricope va jusqu’au verset 20

v. 1-3 évoque l’apostolat.

v. 1 « 72 autres disciples », le nombre des nations païennes selon la Septante ; une préfiguration de la mission aux nations du monde, après Pâques et Pentecôte

« devant lui – devant sa face » ; Chouraqui la met au pluriel, « devant ses faces »

« là où il devait aller lui-même »

La face du disciple devant la face du maître … la face de l’autre – présence réelle du maître : l’enjeu déterminant est le face-à-face entre paix et paix, paix donnée et paix reçue ; c’est le sens profond du cercle herméneutique ou kérygmatique.

Jésus « désigne », « installe » : la vocation est une installation est une consécration.

Pour Bovon c’est un envoi préparatoire, une « formation, un exercice, une répétition générale ».

J’en doute : avant Pâques est après Pâques, et Dieu après le Christ est Dieu avant le Christ (cf. Prologue de Jean). La rencontre avec Dieu et sa parole n’est jamais un exercice ; elle est toujours absolue. La succession apostolique remonte autant à Abraham, Isaac, Jacob et Moïse qu’à Pierre. Et « l’enfant de paix » du v. 6 est enfant de paix avant que repose sur lui la paix qui lui est apportée.

La nouveauté est cette conscience du face-à-face (christologique) de paix à paix qui rend manifeste l’imminence du Règne de Dieu. Même celle-ci est éternelle (la création souffrante de la lettre aux Romains), mais en Christ singulièrement, personnellement et tragiquement évidente. Rien de nouveau, parce que toujours tout est tout nouveau quand rencontre avec Dieu il y a.

v. 2 « la moisson » – jugement dernier, ici positif ; cf. v. 9

« … la marche missionnaire commence par une prière » (Bovon) ; ce n’est pas le sens du texte, me semble-t-il :

all. « jemanden bitten », et non « beten », donc « demander au maître d’envoyer des ouvriers » pour pouvoir répondre à l’abondance de la moisson, ce qui est évidemment aussi une prière, mais pas telle que Bovon la conçoit.

v. 3 Les « loups », pour Chouraqui les « fils de la Louve », donc les Romains ; ainsi un simple constat et une dépsychologisation ; le front polémique devient politique ; moins religieux.

 « Allez ! », une exhortation, il faut y aller.

 « une note de confiance, de calme, d’absence de souci … qui contraste avec … les agneaux parmi les loups » (Bovon), cela seulement quand on ne suit pas la piste de Chouraqui.

v. 4 Le dépouillement du disciples ; sa « nudité » renvoie à sa personne comme « outil » définitif de la mission à accomplir.

Urgence de la mission, pas de formalités.

« Jésus va … jusqu’à interdire le minimum que tout voyageur doit prendre avec soi. » (Bovon). Et si ce n’était pas une remarque polémique, mais une insistance sur ce qui compte réellement, la personne elle-même, dépouillée, « nue » dans sa fragilité, pas encombrée, mais entièrement disponible pour ce « face-à-face », « devant sa face » ?

« La fragilité du missionnaire et sa dépendance à l’égard du Seigneur et des habitants du lieu visité. » (Bovon, p. 56). La présence de Jésus, de « sa face », suffit, « garantit la paix et la sécurité ».

v. 5-7 Manger, boire, se reposer comme « médiations à la communication (de l’Évangile) »

La paix, « c’est la plénitude de vie et de relations, le bonheur dynamique et concret, la marque du royaume messianique. … Telle est la véritable salutation. … Le Dieu qui envoie est aussi celui qui accompagne, car c’est de sa paix qu’il s’agit. » (Bovon)

Dans notre passage il n’y a pas d’invitation à la conversion, juste une « simple » offre de paix ; aussi, la présence « d’enfants de paix » est donnée (v. 6). En conséquence, ne parlons pas d’évangélisation ou de mission, mais d’accompagnement spirituel et de diaconie (v. 9), de service et de cheminement commun, finalement mutuel et communautaire. Il s’agit de (co)naissance d’Église, d’Église naissante « devant lui, devant sa face ». Il s’agit de face-à-face en Jésus Christ, de manifestation du Règne de Dieu. C’est une actualisation de ce qui est donné.

« Permettez-moi de vous saluer, de vous remettre à la paix, de vous offrir la paix (de Dieu). » Rien de plus, mais rien de moins non plus.

Alors rendre la poussière (v. 11) n’est pas une malédiction, mais un constat tragique et douloureux d’un échec. Qui refuse la paix se juge lui-même (v. 16).

v. 5 « maisons » … dans mon contexte du handicap mental, relationnel et social les « institutions »

« Shalom », « Paix à cette maison » – Un vœux de prospérité, de santé et de bonheur, une bénédiction : un face-à-face face au Christ. Une paix messianique qui est efficace pour celui qui la reçoit. Don réel de la paix , qui la souhaite la rend réellement ; une parole « bienfaisante »

Comment dire cela aujourd’hui ? A travers la face de l’autre, figure du Christ et de son disciple.

v. 6 « un homme de paix » (TOB), non, suffit « un fils, enfant de paix » (Bovon) qui accueille la paix.

En quelque sorte la paix précède les envoyés ; leur paix la « confirme », elle met en lumière « la face » devant laquelle il y a rencontre.

Quand paix rencontre paix il y a Règne de Dieu, communication et transmission d’Évangile.

Qu’est-ce donc un missionnaire ?

C’est quelqu’un qui est à la recherche d’enfants de paix pour partager avec eux la paix de Dieu. Devant celui qui refuse celle-ci, il est impuissant.

Si la paix n’est pas reçue elle revient à celui qui l’accorde, c’est presque une évidence …

v. 10.11 perdent ainsi leur sens polémique : il n’y a qu’à rendre la poussière ; sans paix et la bénédiction qui en suit ne reste que poussière.

v. 7 Ne pas abuser de l’hospitalité et non plus s’y installer ; ne pas perdre de vue la finalité, le but.

v. 8 La « ville » – là où était au v. 5 la « maison »

La ville est le champ missionnaire (Bovon), « lieu de la vie, de l’histoire, du pouvoir, de la conversion, de l’implantation, puis de l’édification d’églises, de l’acceptation ou du rejet collectif de l’Évangile. »

Il y a un « effort d’historicisation » et « d’œuvre publique ».

« Le v.8 redit pour la ville ce que les v. 5-7 disaient pour la maison. »

« manger de ce qui vous est servi », une attitude respectueuse qui dépasse les règles alimentaires religieuses.

v. 9 La « guérison » des malades (TOB), le « soin » des malades (Bovon) : « soignez les malades »

« therapeuô », honorer, rpendre soin de, donner des soins médicaux, soigner »

Luc « insiste moins sur la guérison … que sur les soins exigés. Dieu se chargera de la guérison, lente ou immédiate. … L’Église chrétienne trouve en cette prescription la légitimation de son oeuvre diaconale et hospitalière. » (Bovon)

v. 11 Le Règne/Royaume (synonymes) de paix est là, il s’est approché de façon absolue, que la paix soit reçue ou non.

Désormais tout est possible.

« Mind map » de la prédication sur Luc 10,1-11 du 7.7.13 à la chapelle de l’Institution de Lavigny

Armin Kressmann 2013

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