Si nous n’arrivons pas à suspendre tout ce que nous croyons savoir sur le handicap mental dans ses formes multiples, nous n’y comprendrons jamais rien.
Nous devrions faire de sorte qu’il nous parle, lui, qu’il nous dise ce qu’il a à dire, qu’il se révèle à nous. Nous devrions d’abord apprendre ses codes et ses langages, avant de lui attribuer des significations usuelles qui sont les nôtres, – folie, troubles de comportement, décompensation, agressivité, déficit, invalidité, etc. Nous devrions apprendre à le comprendre dans ses langues diverses, puis l’écouter.
Nous n’y sommes pas encore et nous n’y serons jamais si nous le considérons comme pathologies et déficiences par rapport à quelque chose dont nous croyons être, – nous, les « normaux » -, en possession, l’intelligence par exemple. Ne confondons pas toujours handicap et maladie. C’est le regard qui handicape, le nôtre, qui met en situation de handicap.
Le même piège nous est d’ailleurs tendu face à ce que nous appelons démences de la vieillesse ; un jour peut-être nous souhaiterions aussi que quelqu’un nous prenne tel que nous sommes et nous comprenne dans notre univers, nos pensées et notre langage.
Armin Kressmann 2011