11.16 Les situations extrêmes : l’échec de l’éthique ou la diffraction éthique

Significations du handicap mental : 11.16 Les situations extrêmes : l’échec de l’éthique ou la diffraction éthique

Je vise dans mon approche la relation que nous entretenons avec la personne en situation de handicap extrême, relation fragile, parfois insupportable, toujours au risque d’être rompue, devant ce que Georges Saulus appelle la « diffraction éthique ». Dans l’impossibilité de pouvoir la définir directement, il l’illustre par la figure d’Élisabeth Smerdiachtchaïa dans les « Les Frères Karamazov » de Dostoïevski :

« Elisabeth est en situation extrême[1], et elle est violée …

(Le) phénomène de diffraction éthique (tient) en quatre propositions :

–         le viol d’Élisabeth est la manifestation d’un phénomène qui mérite, analogiquement, le nom de diffraction éthique ;

–         c’est la situation extrême[2] qui a favorisé chez Fiodor Pavlovitch la déviation du mouvement éthique habituel relatif à autrui[3] ;

–         dans une relation interindividuelle, la situation extrême de l’un des acteurs tend toujours à induire un phénomène de diffraction éthique ;

–         le phénomène de diffraction éthique ne se limite pas à la déviation d’un mouvement ; comme son homologue optique il révèle la nature de ce dont le mouvement est dévié, c’est-à-dire la nature de l’éthique. » (Situations de handicap extrême et diffraction éthique ; in : Régines Scelles (dir.) ; Handicap : L’éthique dans les pratiques cliniques ; érès, Ramonville Saint-Agne 2008, p. 90)

La diffraction éthique comme coulpe, ou péché ?

Non : LE péché (la coulpe) serait perdre la foi, la confiance ultime en cette personne au point étrange que toute relation ou bien semble impossible ou bien dérive vers une déviance telle que l’éthique professionnelle (la déontologie) et l’éthique interpersonnelle habituelle soient brisées (la diffraction éthique)

Comment traverser ces épreuves, le monde au bout de ses moyens ?

La résurrection[4] ?

Voir la personne, voir l’homme, à travers, non, au-delà de la diffraction éthique !

Armin Kressmann 2011


[1] « idiote », aphasique, sauvage, « monstre », mentalement handicapée …

[2] Pour Georges Saulus une situation extrême est

« une situation qui a la particularité d’être faite tout à la fois de dénuement et de vulnérabilité extrêmes (subis, et non pas volontaires) » (p. 88)

[3] Mais, soulignons-le, devant la question : « Peut-on … tenir un tel monstre pour une femme ? ». Le viol comme « confirmation » de la féminité, donc de la personnalité ?

[4] Comment appeler ce dont il s’agit ? Résilience ? Non, premièrement parce ce qu’il ne peut pas avoir vraie résilience après un traumatisme grave, deuxièmement parce que le terme juste, la résurrection, ne désigne pas une action ou un comportement de celui qui ressuscite, mais le fait qu’il « est ressuscité » ; donc l’acteur est un tiers (Dieu, le Père, Créateur du ciel et de la terre, agissant en Jésus Christ par son Esprit en théologie chrétienne,  – une personne, caractérisée par tous ces termes métaphoriques qui expriment chacun des concepts complexes pour les uns, des réalités pour les autres).

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