Assistance au suicide : EXIT et les institutions sociales

« EXIT – ADMD Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité Suisse romande » défend la position suivante[1] (le texte de mon article a été rédigé en 2004 ; il cite donc ce qui a figuré à la même époque sur le le site de l’organisation) :

« Tout adulte lucide, qui après avoir tout essayé, estime que la vie lui est devenue absolument insupportable, a le droit de prendre en charge sa mort et d’y être aidé. »

Elle donne comme objectif premier la lutte contre l’acharnement thérapeutique, mais ne mentionne pas les soins palliatifs. Elle mise pleinement sur l’autonomie et le droit à l’autodétermination du sujet et, en conséquence, ne parle pas de suicide mais « d’autodélivrance ».

Elle met en avant

« le droit pour chacun de choisir sa manière de vivre les dernières étapes de sa vie, le droit du malade d’être maître des dernières étapes de sa maladie et le droit à une mort digne et humaine ».

Elle encourage la personne concernée à prendre son destin elle-même en main ou à s’adresser à son médecin traitant ou un

« médecin acquis aux idées d’EXIT mais agissant à titre privé ».

Pour celui ou celle qui demande l’aide à EXIT elle-même, elle applique le « principe de précaution » et demande des critères qui vont au-delà de l’objectif général susmentionné (diagnostic, pronostic, entretiens ; expressions répétées de la volonté ; tout ce qu’elle appelle un « protocole »).

Tout en mettant en avant la lutte contre la souffrance et l’acharnement thérapeutique, – craintes premières de la population -, le droit à l’autodétermination me semble l’objectif principal. Ainsi nous nous trouvons devant un principe de la pensée libérale qui met la question de l’autonomie du patient au centre de la réflexion. Se pose alors la question : dans quelle mesure les patients et les résidents de nos hôpitaux et institutions sont réellement aptes à exercer et à assumer leur liberté et leur autonomie ? Au niveau de la bioéthique classique, nous devrions regarder s’il n’y a pas glissement implicite du principe de bienfaisance et de non-malfaisance vers la seule autonomie. L’assistance au suicide, à mon avis, prend toute une autre couleur étudiée soit sous l’un, soit sous l’autre des deux angles. Donner priorité à l’un ou à l’autre des deux principes est en lui-même de nouveau un enjeu d’ordre éthique.

Il me semble que les institutions qui, – traditionnellement et par leurs missions (cf. chartes) -, mettent et doivent peut-être mettre bienfaisance et non-malfaisance au premier rang de leurs préoccupations, sont désormais confrontées à des organisations et des attentes qui priorisent l’autonomie. C’est probablement un phénomène de mutation sociale. Il serait intéressant d’étudier les changements, chances et risques possibles. Les mêmes tendances se manifestent de plus en plus dans les milieux des personnes en situation de handicap, notamment de handicap physique[2]. Les visions nouvelles qui se dessinent et se dégagent, dans quelle mesure se laissent-elles s’appliquer pour la vie des personnes en situation de handicap mental ou psychique ? Le débat est ouvert !

Armin Kressmann 2004

« Assistance au suicide 5 : la situation dans les EMS du canton de Vaud

Assistance au suicide et institutions sociales 7 : quelles valeurs mettre en avant ? »



[1] www.exit-geneve.ch

[2] cf. par exemple Kanka, K. et Suter, M.F., Eigenständigkeit und Selbstverantwortung, Kostensparendes Pilotprojekt für Behinderte, NZZ no. 166 du 20 juillet 2004

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