Dans l’accompagnement de personnes en fin de vie ou en situation de souffrance lourde et par rapport à la question de l’euthanasie et de l’assistance au décès, voire au suicide, ne se pose pas seulement la question des interdits à l’atteinte de l’intégrité corporelle et à la vie, mais aussi, plus positivement, celle du respect, de la protection et de la promotion de la vie et de sa dignité. Ainsi, la constitution fédérale stipule :
« Art. 7 La dignité humaine doit être respectée et protégée.
Art. 10/1 Tout être humain a droit à la vie … »
Cette protection doit être mise en relation avec la liberté :
« Art. 10/2 Tout être humain a droit à la liberté, notamment à l’intégrité physique et psychique … »
Déjà là, deux valeurs sont à contrebalancer, celle de la liberté personnelle et celle de la protection la vie.
Ainsi, en Suisse, la conception de la liberté va très loin et le suicide n’est pas interdit par la loi, et l’assistance au suicide, sous certaines conditions, non plus. Le Code pénal dit seulement :
« Art. 115 Celui qui, poussé par un mobile égoïste, aura incité une personne au suicide, ou lui aura prêté assistance en vue du suicide, sera, si le suicide a été consommé ou tenté, puni de la réclusion pour cinq ans au plus ou de l’emprisonnement. »
Nous pouvons constater que le législateur suisse ne réprimande pas ni l’incitation ni l’assistance au suicide, sous condition que celles-ci ne soient pas exercées par des « mobiles égoïstes ». C’est par cet angle que des organismes comme EXIT développent leurs activités et « promeuvent » le suicide en situation de souffrance grave (voire à travers lui à plus longue échéance l’euthanasie ?). De l’autre côté, il faut aussi constater que le législateur, – jusqu’à nouvel avis -, n’en fait pas de la promotion. Positivement il n’est pas question d’un droit au suicide ou d’un droit d’y être assisté. Aussi j’ajoute maintenant déjà, que nous devons rester très prudents dans l’interprétation des « mobiles égoïstes » et je me permets de poser la question si ceux et celles qui promeuvent l’assistances au suicide voire l’euthanasie agissent toujours par des mobiles altruistes. Il faudrait voir la jurisprudence comment le Tribunal fédéral manie et interprète les « mobiles égoïstes », ce qui va trop loin dans le cadre de ce travail. Au-delà du côté légal reste encore la dimension morale et la vision que nous avons du suicide (cf. plus bas).
Ajoutons qu’incitation et assistance ne peuvent être admises qu’à l’égard de personnes « capables de discernement » ; le Code civil dit :
« Art. 16 Toute personne qui n’est pas dépourvue de la faculté d’agir raisonnablement à cause de son jeune âge, ou qui n’en est pas privée par suite de maladie mentale, de faiblesse d’esprit, d’ivresse ou d’autres causes semblables, est capable de discernement dans la sens de la présente loi. »
Sans preuve du contraire, la capacité de discernement est généralement présumée.[1]
Armin Kressmann 2004
« Assistance au suicide 3 : une définition
Assistance au suicide 5 : la situation dans les EMS du canton de Vaud »
[1] Ordre professionnel de l’AVDEMS, « Les EMS face à l’assistance au suicide, Etat de la question et recommandations », Pully 2002, p. 6