Vulnérabilité et capabilité : caresse et tendresse, pour une approche ludique de l’autre (Lévinas)

Dans les soins palliatifs comme dans l’accompagnement de personnes en situation de handicap extrême, notamment polyhandicap, le rapport au patient ou au résident doit être guidé par la tendresse, un jeu de propositions et contre-propositions, finalement érotique, mais, évidemment, sans être sexué. Ce sera un jeu qui sera guidé non pas par les soins et les accompagnants, mais par le patient ou le résident lui-même. Il s’agira de suivre son rythme, de répondre à ses demandes et à ses besoins, sans objectifs autres que le moment présent. Passivité, dans le sens de lâcher prise (« Loslassen und Gelassenheit »), réceptivité, compassion et empathie, recevoir les moments de grâce qu’on ne peut pas prévoir, se verra ce qui ne se voit pas, on entendra ce qu’on entend pas, on touchera à ce qui ne se laisse pas saisir, se dévoilera ce qui est couvert, sous le « pallium », la couverture des soins palliatifs :

L’amour n’est pas une possibilité, il n’est pas dû à notre initiative, il est sans raison, il nous envahit et nous blesse et cependant le je survit en lui.

… la place exceptionnelle du féminin, et … l’absence de toute fusion dans l’érotique.

La caresse est un mode d’être du sujet, où le sujet dans le contact d’un autre va au-delà de ce contact … ce qui est caressé n’est pas touché à proprement parlé.

Cette recherche de la caresse en constitue l’essence par le fait que la caresse ne sait pas ce qu’elle cherche. Ce « ne pas savoir », ce désordonné fondamental en est l’essentiel. Elle est comme un jeu avec quelque chose qui se dérobe … avec quelque chose d’autre, toujours inaccessible, toujours à venir. La caresse est l’attente de cet avenir pur, sans contenu. Elle est faite de cet accroissement de faim … ouvrant des perspectives nouvelles sur l’insaisissable.

Elle s’alimente de faims innombrables.

(Emmanuel Lévinas, Le temps et l’autre)

Cette fois-ci, les soins et la sollicitude l’emporteront sur l’éducation.

Dans la dureté des moments se dévoilera ce qui ne se laisse pas voir, ce qui ne se laisse pas toucher, ni saisir, ni maîtriser … encore une fois, ce n’est que l’art qui sera à sa hauteur, le sacré et parfois aussi le profane :

Kiki de Montparnasse dancing (Markus Raetz)

Armin Kressmann 2009

« Vulnérabilité et capabilité 10 : transcendance, esprit, spiritualité, art et rite

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