Semaine de prière pour l’unité des chrétiens 2017 – « Laissez-vous réconcilier » (2 Co 5,20)

« Laissez-vous réconcilier » 2 Corinthiens 5,14-20(21), et non pas « Nous réconcilier »

Le dossier qui nous est proposé pour la « Semaine de prière pour l’unité des chrétiens » me laisse perplexe. Il vient des Églises allemandes et à été élaboré en vue de 500ème anniversaire de le Réforme. Je m’attendais donc à une théologie qui met en avant la grâce et la réconciliation en Jésus Christ, donc la remise du péché et de ses corollaires, toutes ces fautes et autres transgressions (2 Co 5,19), et comme conséquence à une invitation à célébrer l’unité qui en Jésus Christ nous précède et nous est donnée. Mais non, les démarches qui nous sont proposées, nous invitent encore et toujours à « nous réconcilier » et à « confesser nos péchés ». Au lieu d’une théologie de la grâce, premier héritage de la Réforme, nous est de nouveau proposée une théologie qui fait de la réconciliation une œuvre. Du péché, singulier, on fait de nouveau des péchés, une pluralité de fautes et transgressions, et de la rupture fondamentale de la non-foi en l’autre, du fait qu’il devient non-existant pour nous, non-être (Psaume 14, qui par excellence définit le péché), on fait une morale. Dans le texte qui nous est soumis, sur 28 apparitions du mot « péché » en français, 26 sont au pluriel, et le verset biblique qui explicitement parle du « péché » (v.21) ne nous est pas proposée pour lecture dans nos célébrations. Pour les Églises, me semble-t-il, la réconciliation en Jésus Christ n’est pas effective. L’invitation à la réconciliation devient ainsi expression de non-foi, donc « péché », et les Églises se suspendent elles-mêmes, ce qui, par ailleurs, se manifeste déjà dans l’appellation « Semaine de prière POUR l’unité ». En Jésus Christ nous sommes UN, la semaine de prière devrait être un moment de « célébration DE l’unité des Églises », et cela contre toute réalité sur le terrain et dans le monde, donc une expression de la foi en l’efficacité réelle de l’œuvre de Dieu en Jésus Christ :

« Celui qui n’avait pas connu le péché, il l’a, pour nous, identifié au péché, afin que, par lui, nous devenions justice de Dieu. » (2 Corinthiens 5,21)

Dans cette conviction profonde, Paul nous invite à « NOUS LAISSER réconcilier avec Dieu », et les uns avec les autres, et à être « ambassadeurs » de cette réconciliation (v. 20).

Alors, pourquoi cette insistance constante sur la réconciliation comme œuvre ?

  • Pour cette année et le matériel qui nous concerne, cela pourrait (aussi) être une question de traduction : là où l’allemand met « Versöhnung », laisse ouvert l’acteur ou les acteurs, le français le remet aux humains, « nous réconcilier ».
  • Quand on regarde la liste des personnes responsables du dossier, les protestants réformées et luthériens sont en minorité, les théologies catholiques, orthodoxes ou évangéliques, tout en étant probablement fondamentalement d’accord avec nous, ont quand même tendance à faire de la foi une morale, risque auquel notre Église, par ailleurs, n’échappe pas non plus.
  • Plus profondément, ce basculement est inné à l’homme, qui par ses institutions, dont font partie les Églises, veut contrôler l’homme et fait de la religion un instrument du pouvoir. Dans le monde, aussi celui des Églises, contre Dieu, la loi l’emporte sur l’Évangile.

Armin Kressmann, 2017

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