Matthieu 20,1-16 (Mt 20,1-16) – « Les derniers seront les premiers » : notes exégétiques et pistes de prédication (commentaire en vue du Jeûne fédéral)

(avec la TOB (Traduction œcuménique de la Bible) ; André Chouraqui ; Matyah, Evangile selon Matthieu ; JClattès, 1992 ; Pierre Bonnard, L’Évangile selon Saint Matthieu, Labor et Fides, Genève 1982)

Évangile selon Matthieu, chapitre 20, versets 1 à 16, le texte (Mt 20,1-16 ; TOB)

Matthieu 20,1-16 (Mt 20,1-16) – Premières réactions

19,13-15 Jésus et les enfants … « le Royaume de cieux est à ceux qui sont comme eux »

19,16-30 Le jeune homme riche

  • Dieu seul bon : « unique est celui qui est bon »
  • Décalogue et commandement d’amour du prochain
  • Être « parfait » devant Dieu : « vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres … suis-moi »
  • La difficulté d’entrer dans la Royaume des cieux
  • « à Dieu seul tout est possible »
  • Suivre Jésus … la vie éternelle
  • « beaucoup de premiers seront derniers et beaucoup de derniers, premiers »

La visée du passage est donnée : reconnaître la bonté de Dieu et en tirer les conséquences, mais c’est difficile, même pour ceux qui s’y engagent.

Quand on regarde ce qui suit …

20,17-19 Troisième annonce de la passion et de la résurrection,

on vite que le prix est cher, ce qui est par la suite illustré par le passage des « métayers révoltés » (21,33-46 ; cf. 5 octobre 2014)

Et qui le paie ? … La montée vers Jérusalem, donc « l’intendant » (20,8)

Seraient-ce les « murmures » du v. 11 qui provoquent même le drame ?

20,1 Le « royaume des cieux », comparable à un « maître de maison » : « un homme, un patron » (Chouraqui), « un homme, un maître de maison » qui sort tôt le matin pour embaucher des ouvriers dans son vignoble à lui.

La vigne, symbole du peuple et de la terre d’Israël

v. 2 Il y a accord mutuel sur le salaire

Un denier : salaire quotidien d’un ouvrier

v. 3 Est donnée « ce qui est juste »

v. 6 Sont embauchés ceux qui n’avaient pas travaillée jusqu’à la onzième heure (19h)

v. 7 … « parce que personne ne nous a embauchés » ; ce n’est donc pas leur faute ; « personne ne prend plus garde d’eux » (Bonnard)

« Tels étaient les ‘pécheurs’ au temps de Jésus, abandonné par les pharisiens … » (Bonnard)

Ici une actualisation par rapport au marché du travail et la question des salaires justes s’impose.

v. 8 Les ouvriers sont appelés pour la remise du salaire ; l’intendant est invité à commencer avec les derniers

On pourrait y voir un élément d’éthique de justice : priorité ont les « derniers », et c’est ainsi que le derniers devraient être les premiers (v. 16)

« Le premier (principe) exige l’égalité dans l’attribution des droits et des devoirs de base. Le second, lui, pose que des inégalités socio-économiques … sont justes si et seulement si elle produisent, en compensation, des avantages pour chacun et, en particulier, pour les membres les plus désavantagés de la société. » (John Rawls)

Passage du « maître de la maison, le patron » (v. 1) au « Seigneur de la vigne », maître, propriétaire et Seigneur.

« Le soir étant venu », « c’est une allusion à peine voilée au temps dernier du jugement. Le contremaître … est probablement une figure du Christ. » (Bonnard)

v. 10 Les premiers pensent recevoir davantage

v. 11 Les « murmures » : « tu les traites comme nous … »

« C’est la protestation instinctive de l’homme privilégié contre la grâce accordée à ceux qui n’ont rien. » (Bonnard)

v. 13 Il n’y a pas tort :

  • il y avait accord
  • la volonté libre du « patron »
  • celle-ci régie par sa bonté, donc ne pas arbitraire (v. 15)

« mon ami », avec une pointe de condescendance

« Jésus veut … montrer que la bonté de Dieu dépasse les catégories humaines de la rétribution conçue comme un salaire dû, sans pour autant verser dans l’arbitraire qui méconnaît la justice ; il invite à ne plus se montrer jaloux devant la libéralité de l’amour de Dieu. » (TOB)

Dans quelle mesure bonté et amour se confondent ? La première découlant du second (cf. commandement d’amour en 19,18.19) ?

Amour (de Dieu) … bonté … volonté qui ne peut être que bonne, donc prime sur notre conception de la bonté (et de la justice)

Ici, dans cet ensemble, amour et justice sont, même dans le premier sens du terme, entre-croisés amour et justice.

Rappel du Psaume 85 ?

« Par le ministère de Jésus, la bonté souveraine de Dieu comble les pécheurs et les païens (cf. 18,17 AK) qui, vers les années 80, affluaient dans les Églises syro-palestiniennes au grand scandale du judaïsme rabbinique ambiant. » (Bonnard)

v. 15

« Personne n’a un droit acquis sur le royaume des ciels o~u tout dépend du bon vouloir de l’Ad^n (Seigneur) et de la qualité des serviteurs. » (Chouraqui)

Le « mauvais œil », naît de l’envie ; il est maléfique en soi (Chouraqui). « Annonce de la croix » (Bonnard).

Le mauvais œil est une expression antique et biblique connue ; … elle désigne … le mouvement de colère et de jalousie de l’homme tout entier ; chargé de haine (Bonnard).

V. 16

« Les derniers deviennent les premiers, ce sont ces ouvriers de la onzième heure qui, appelés les derniers, sont les premiers à goûter la souveraine bonté du maître de la vigne (v. 15) … C’est la générosité inattendue du maître de la vigne à l’égard des derniers ouvriers qui renverse la situation. Si les premiers ouvriers s’étaient aussi réjoui de cette générosité royale, tous les ouvriers eussent été ensemble au premier rang ; ce sont les murmures de jalousie … qui les ont fait reculer au dernier rang. » (Bonnard, p. 291)

Armin Kressmann 2014

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