Luc 2,22-40 Salut, présence, reconnaissance, réconfort et paix ; pistes exégétiques et homilétiques (commentaire)

Quand il est là, je suis là. Il s’agit d’être là, de « Dasein », d’être, tout simplement.

Baptême de Maïva (« bienvenue »)

Prolongement de Luc 2,1-20(21) « Pour Dieu tout enfant est légitime, quoi qu’il lui soit arrivé, à lui ou à sa maman »

(avec la TOB (Traduction œcuménique de la Bible) ; André Chouraqui ; Loucas, Evangile selon Luc ; JClattès, 1993 ; François Bovon ; L’évangile selon saint Luc ; Commentaire du Nouveau Testament IIIa, Labor et Fides, Genève 1991)

Voici le texte, Luc 2,22-40 (TOB)

Il s’agit toujours de l’enfant, de sa présence, en lui-même, devant Dieu et les autres, et de notre présence, devant lui, Dieu et les autres. Comme je disais :

« La réalisation de soi, « le salut », est une réalisation de l’enfant qui naît en nous ; vivre est faire naître l’enfant en nous. Le lieu en est la mangeoire, la crèche de toute la création. Cependant, le chemin passe par le Christ (messie ; « laissez venir les enfants à moi »), la croix et la résurrection (et non l’Église). »

L’enfant est le signe :

« Jésus est signe, signifiant et le signé … Il est « la chose » ; l’enfant l’est ! »

Notre texte le confirme et l’explicite. Faut-il être vieux pour découvrir (« apocalypse ») l’enfant, Syméon et Anne, dépasser la Loi, l’institution et tout ce qui est institutionnel, « die Ein-richtung » (« ce qui donne direction »), et entrer dans une, la nouvelle alliance ? Nunc dimittis. Maintenant je peux lâcher tout, laisse-moi partir en paix, Seigneur.

« Comme ‘Jérusalem’, ‘la loi’ forme une inclusion, qui scelle l’unité des v. 22-39 : les idées d’événement et d’accomplissement de la loi encadrent cette péricope.

… L’accomplissement de la loi reste pour Luc le cadre dans lequel doit se placer l’extraordinaire : l’ultime prophétie.

… L’histoire du salut ne sort pas du néant, mais de l’observance fidèle et quotidienne de la loi. Elle n’est pourtant pas provoquée par l’obéissance humaine, qui n’en constitue que le cadre, ou le terrain. Le salut ne peut être mis en mouvement que par l’Esprit de Dieu. Après les trois mentions de la loi, résonne, à trois reprises aussi, le mot Esprit. Loi et Esprit, certes, s’opposent mais s’interprètent aussi, comme l’ancienne alliance (le vieux Syméon) et la nouvelle (le petit enfant). » (F. Bovon)

v. 22-24

« L’offrande de Jésus au Seigneur, ‘rendre à Dieu ce qui est à Dieu’ (20,25), est raconté selon le modèle de Samuel. » (F. Bovon)

v. 22 « suivant la loi » – Jésus est juif ; nous sommes inscrits dans une tradition, une « institution », qui nous précède et qui indique une ou la « direction » à prendre. Mais est-ce celle-ci qui sauve ? Quand je me présente devant Dieu, puis-je l’invoquer pour me justifier devant lui ? « Seigneur, je fais partie de ton Église et j’ai toujours fait ce qu’elle m’a demandé. » Où est la responsabilité personnelle ? Comment se présenter devant lui ? Selon la loi ? Où enfant, « personne » ? Je suis personne devant toi, Seigneur ? Me voilà donc, tel que je suis.

« ils devaient être purifiés », lit. « quand furent accomplis les jours de leur purification »

Lévitique 12,1-8 Purification de la femme accouchée

« Il s’agit principalement de celle de Miriâm qui, ayant enfanté un fils, devait attendre quarante jours avant de se purifier pour remplir à nouveau ses devoirs religieux dans le Sanctuaire (Lévitique 12,6-8). En principe le premier-né mâle appartenait à Adonaï auquel il devait être racheté par le paiement d’une somme … il se faisait le jour de la circoncision … » (A. Chouraqui)

v. 23 Rachat du premier-né Exode 13,13 et 34,20

v. 24 Offrande en sacrifice

Nous sommes dans un contexte régi par la loi et les rites.

Pour nous aussi se pose la question des rites : pour quelles raisons baptisons-nous, p. ex. ? Traditionnelles, sociales, spirituelles, pour l’enfant, nous-mêmes, les autres ?

v. 25

« il attendait la consolation d’Israël » – le salut, « réconfort » (A. Chouraqui)

« le réconfort, paraclésis en grec : Le Paraclet correspond au Menahèm annoncé par Esaïe 40,1 : ‘Réconfortez, réconfortez mon peuple, dit votre Dieu. » (A. Chouraqui)

« appel pressant, exhortation, consolation » (F. Bovon)

« La foi au Christ est la réponse … à l’attente (d’un signe) »

v. 26 « le Christ du Seigneur », titre messianique différent de « Christ Seigneur », qui lui confère un caractère divin

Qui est le Seigneur ? Les ambivalences bibliques nous incitent à nous poser cette question ? La réponse, en paroles (« fides quae ») et surtout en actes (« fides qua »), est confession de la foi.

v. 27 « les parents » … v. 33 « le père et la mère », ici Luc n’a aucun problème avec la paternité de Joseph. Il est « normal » que Joseph soit le père de Jésus. Il assume sa responsabilité (institutionnelle), et c’est ce qui compte.

v. 29ss La promesse est accomplie.

 « détacher, laisser aller » … « peut être un euphémisme pour la mort, mais peut aussi désigner la libération de l’esclave ou le congé après un service. » (F. Bovon)

« ‘maintenant’ … comme ‘aujourd’hui’ est le signal du moment crucial de l’histoire du salut … Son but comme son instrument est la paix. »

v. 31-32

« Le salut qu’incarne Iéshoua` est une ‘apocalypse’ (révélation, découvrement) pour les nations, et une libération, une gloire, pour Israël. » (A. Chouraqui)

v. 32 « révélation aux païens »

« Le salut des païens est annoncé ici pour la première fois dans l’œuvre de Luc. » (TOB)

« Le salut eschatologique est décrit ici comme ‘lumière’. Nous ne sommes pas arrachés à l’histoire, à la souffrance et à la mort, mais, par la révélation divine, nous pouvons comprendre notre situation et notre avenir. » (F. Bovon)

v. 34

« Jésus est un signe. Il ne s’impose pas, mais doit être accueilli librement par la foi. » (TOB)

« Iéshoua` sera un signe (voir Luc 11,30), et donc une occasion de chute pour ceux qui le rejetteront (Esaïe 8,14-15), mais de salut pour ceux qui adhéreront à sa personne et à son message (… Esaïe 11,12 et 13,2). » (A. Chouraqui)

« … contraste entre l’hymne, v. 29-32, et le discours privé adressé à Marie (v. 34-35) : d’un côté, la paix et la lumière ; de l’autre, le glaive et la souffrance … Le viel homme prend conscience de ses contradictions intérieures et les assumes. Ce n’est qu’ensuite qu’il peut s’en aller en paix, c’est-à-dire lever ses contradictions et se réconcilier avec lui-même. » (F. Bovon)

v. 35 « l’âme » – toute la personne – la personnalité de la personne

v. 38 « le rachat, la libération de Jérusalem », le salut du peuple de Dieu

Salut :

  • la consolation, le réconforté
  • le rachat, la libération
  • la paix
  • la reconnaissance et la réalisation de soi
  • la résurrection de l’enfant (en nous)

Le salut – consolation et réconfort – passe par l’enfant, clé de la libération du peuple tout entier ; l’enfant est le médiateur ou le pivot de la présence réelle de nous devant Dieu et de Dieu parmi et en nous. Il est « consacré au Seigneur », lui-même « Christ du Seigneur », l’oint, digne et saint. C’est le tournant existentiel au sein de l’alliance de Dieu même que nous appelons passage de l’ancienne et la nouvelle alliance. La première se fonde sur un pacte, une « institution », la loi, la seconde, qui est fondamentalement la même, sur la personnalité (la sainteté ou la dignité) de toute personne (ou l’amour), reçue et reconnue comme telle par Dieu en personne. Cela révélé par l’Esprit Saint, donc Dieu lui-même, une fois accueilli par Syméon dans un mouvement empathique, – « il le prit dans ses bras » -, il peut partir en paix … mourir et ressusciter lui-même. Il n’a plus besoin « d’être quelqu’un » devant Dieu, il a enfin compris d’être personne.

Armin Kressmann 2013

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