Les protestants réformés et leur culte (EERV) – De la capabilité spirituelle

Il est généralement admis que les Églises traditionnelles, ici en Suisse et en Europe, sont en perte de vitesse ; la mienne aussi, l’EERV Église évangélique réformée du canton de Vaud. Et on dit que leur culte ne parle plus aux contemporains. Il faudrait le changer, l’adapter à notre temps. Soit. Mais, quels sont les besoins de nos contemporains ? Et quels sont les besoins que le culte, en l’occurrence réformé, couvre et souhaite couvrir ? En posant ces deux questions je vais au-delà des considérations sociologiques et démographiques qui disent que le nombre des protestants diminue constamment, que, par contre, les aspirations d’ordre spirituel sont toujours les mêmes, voire plus grandes, et que notre temps est de plus en plus « fluide ». Je dis, tout simplement, que les gens n’aiment pas, n’ont peut-être jamais voulu, penser et réfléchir, mais recevoir des réponses préconçues, et que notre époque, par contraste au passé, leur livre toutes les réponses. Il suffit de choisir dans la pléthore des offres et de s’en faire sa propre opinion. Oui, opinion, et non pas conviction élaborée personnellement en confrontant sa vie avec la pensée telle que transmise par les Églises à travers leurs textes, bibliques et théologiques. La diminution de la fréquentation des cultes va avec la disparition des protestants réformés, des hommes et des femmes qui se coltinent une pensée qui résiste aux réponses simples que posent les questions de la vie. Était-ce mieux par le passé ? Peut-être. Mais on n’avait pas le choix, pas d’autre choix qu’écouter le pasteur, ou l’instituteur, mais c’était plus ou moins la même chose, qui nous disaient ce qu’il fallait penser, croire, dire et faire.

Où sont en conséquence le véritable problème et le défi du culte protestant réformé ?

Ils résident dans la capacité de l’Église et de ses « ministres », pasteurs et diacres, d’abord de faire réfléchir les fidèles, de les habiliter par la suite de partager mutuellement leurs convictions et d’en chercher dans la mesure du possible une vision commune. Ils résident dans la capacité des ministres de se mettre en retrait, de s’abstenir à formuler des réponses avant que les fidèles aient pu parcourir leur propre chemin de réflexion, – flexion, sur la vie et les écritures, puis ré-flexion pour dire ce qui y a été découvert -, et dans leur capacité de fournir aux fidèles les outils pour faire cela. Ce travail est ardu, pour les uns et les autres, et encore plus ardu quand il doit se faire dans le culte, là où on aimerait recevoir des réponses, sans engagement personnel, sans investissement, sans effort, de la part de ce Dieu, qui, pour les protestants réformés, se couvre de silence, parce qu’il a tout dit, tout ce qu’il faillait dire et qu’on peut dire face à nos vie telles qu’elles sont, en Jésus Christ, la croix et la résurrection.

La spiritualité réformée et comme les mathématiques ; cela ne s’apprend pas sans efforts.

Il ne s’agit pas de transmettre, mais d’apprendre à questionner ce qui est transmis, pour en faire le sien. Et c’est cela, le culte protestant réformé. Il s’agit de la « capabilité » spirituelle des croyants.

Ne soyez donc pas étonnés qu’il n’y ait plus de réformés, il n’y en a peut-être jamais eu.

Armin Kressmann 2019

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