Acquérir un culte, une nouvelle offre pour dire sa foi (EERV)

Pour rester pertinentes, ou le redevenir, en ce monde où tout le monde se manifeste dans tous les sens, ou pourrait le faire et y est aussi invité en permanence, pour remplir leur mission qu’est toujours la même, proclamer le salut de Dieu en Jésus Christ, – qu’est-ce que cela veut dire encore ? -, les Églises, c’est ce qu’on dit, devraient être plus confessantes et les fidèles davantage témoins. Soit ! Les catholiques et les orthodoxes le font par le faste de leurs cérémonies, les protestants évangéliques par le témoignages de leur conversion et cela dans le souffle de l’Esprit, les deux, et c’est bien ainsi, témoignant de la gloire de Dieu. Pour nous, les protestants réformés, reste la croix. Les luthériens, au moins, ont maintenu la messe. La parole !? Dans un monde qui veut voir, sentir et faire, ressentir et expérimenter Dieu, et pas seulement y réfléchir, même si la réflexion, le mot le dit, implique la flexion ? Comment témoigner, par la parole, quand personne n’écoute ?

Nos confessions sont des dialectes d’un langage qu’on appelle religion, ici christianisme, langage verbal et non-verbal, jeu de langage pour parler Wittgenstein. Notre grammaire à nous, les réformés, est ce que nous appelons culte, est celui-ci est axé sur et porté par la parole, celle-ci inspirée par la parole biblique à laquelle nous sommes tous et toutes invités à faire écho. Pour le fidèle cela implique l’effort de devenir théologiens, savoir dire Dieu dans le langage qui est le nôtre, en respectant la grammaire de celui-ci : les écritures seules, la grâce seule, seule la foi, Dieu seul, en Jésus Christ, à lui seul la gloire et le jugement des cœurs. C’est simple, mais le traduire en un langage de vie personnel, un mode de vie, le dire avec ses mots et ses actes et en faire sa poésie, éthique, autrement dit, cela n’est pas si simple. Au fond, rien à voir, seulement vivre. Chanter, autrefois peut-être.

Et maintenant ça : qui veut acheter un culte ?

C’est ainsi en tout cas que j’ai interprété l’offre qui nous a été adressée lors de la journée d’offrande dans la paroisse de Gimel-Longirod de l’Église évangélique réformée du canton de Vaud, Suisse (EERV) :

« Vente aux enchères de prestations

Lot : Parole et musique – Tout est à faire

En l’église de Gimel, Saint-George ou Essertines

3/4 heures de parole et musique »

Deux musiciens et membres actifs de la paroisse offrent leurs compétences pour une manifestation à inventer, selon les désirs de l’acquéreur. On était deux à miser, je l’ai emporté, mais je me mettrai ensemble avec ma concurrente.

Je viens donc d’acheter (!) un culte, pour la première fois dans ma vie ! Un culte, parce que une manifestations en une église protestante est toujours un culte, ou devrait l’être, même si c’est une vente comme la vente aux enchères de ce dimanche 3 juin 2018.

Acheter un culte ? Abus ou manière innovante, « fresh expression », pour offrir aux croyants une opportunité pour dire leur foi et célébrer Dieu ? J’opte pour le second point de vue : encadré par les règles du langage qui est le nôtre, selon notre grammaire, avec l’aide de personnes qui connaissent ses outils, construire soi-même ou en équipe une célébration qui correspond à notre sensibilité personnelle, se l’offrir et l’offrir aux autres, finalement à Dieu, peut devenir une voie pour répondre aux changements, « sociétaux » comme on dit aujourd’hui, une société devenue « liquide ».

Savoir nager soi-même, en Église cela s’appelle sacerdoce universel.

Le culte appartient à tous et toutes, c’est aussi du protestantisme réformé. Qu’il appartient à Dieu, et à Dieu seul est une autre manière de dire la même chose.

Faisons donc des nouvelles acquisitions.

Reste la question du prix que nous sommes prêts à y mettre.

Créer un culte, dire Dieu et le célébrer ainsi, c’est le payer avec sa personne, toute sa personne. Le reste ne se distingue pas de ce qui se passe en chaque culte au moment de la quête.

Que le tout soit offrande !

Armin Kressmann 2018

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