EERV PasteurEs, diacres protestantEs réforméEs et leur déontologie, leur savoir être et leur savoir faire

Sur initiative de la Ministérielle, l’association des pasteurEs et diacres, une nouvelle équipe de doyennes et doyens est en train de se mettre en place dans l’EERV, l’Église évangélique réformée du canton de Vaud (Suisse). C’est une bonne chose ; un besoin de réinstauration d’un tel organisme, abandonné avec « Église A Venir » en 2000, se faisait ressentir. Les coordinateurs, – par le fait d’être intermédiaires entre l’Église cantonale et le terrain, « l’employeur et les employés », se trouvant donc dans un double lien -, ont, notamment en situation de crise, de la peine à maintenir l’indépendance nécessaire pour accompagner unE collègue sans aucune conséquence institutionnelle possible.

Une vingtaine de personnes expérimentées, en majorité pasteurEs et retraités, s’est mise à disposition pour cette fonction, tous et toutes des collègues que personnellement j’estime. C’est donc une bonne chose. A deux reprises on s’est retrouvé, chacun, chacune a formulé son offre1, on a discuté du rôle, comment l’envisager, ce qui le caractérise : une « écoute bienveillante » est le dénominateur commun. C’est une bonne chose. Sur d’autres questions les avis divergent ; pasteurE et/ou diacre, être proactif ou non, territorialité ou non, libre choix de la personne de référence ou non, vision déontologique commune ou non, retraités ou non, actifs ou non, nombreuses seraient les questions à traiter encore.

Personnellement, je l’ai exprimé avec insistance, me manque tout ce qui concerne la déontologie, « l’art de métier » de pasteur2 et de diacre, les visions communes, tout ce qui touche à l’identité professionnelle. Comment écouter unE collègue, – professionnellement, c’est quand même de cela qu’il s’agit : « que devrais-je faire en une situation donnée, quelle posture prendre, qu’est-ce qui se passe avec moi quand je suis confronté à … y a-t-il un cadre commun, quelque chose à quoi je peux me référer ? » -, comment écouter et accompagner unE collègue à ce niveau-là est-il possible si nous ne savons pas ce qu’est aujourd’hui unE pasteurE, unE diacre, protestantEs réforméEs ? Que professons-nous, cherEs collègues, par notre profession ? L’amour évangélique inconditionnel, un amour qui aime sans pourquoi, sans règles, indifférencié ? Et celui-là, existe-t-il sans référentiel, cadre « professionnel », loi morale commune ? Si nous, au niveau ministériel, ne faisons pas ce travail de clarification, – comme par ailleurs nos prédécesseurs l’avaient fait, ce qui est un processus créatif -, c’est l’institution, donc l’employeur, qui nous le dit et nous dé-finit, nous dé-limite, nous engage et nous renvoie selon ses critères, nous impose ce que nous avons à faire et comment nous devons le faire, et, finalement, nous dit ce qu’est unE pasteurE et unE diacre protestantE réforméE. A chaque Église réformée ses pasteurEs et diacres à elle ?

Enfin, comment bien écouter unE collègue, quand nous ne sommes pas au clair avec ce qu’est notre caisse de résonance, comment bien résonner, sur quel son et tonalité ? Quel est notre diapason ? Comment résonner et raisonner ?

En tant que doyenNe ne pas être au clair avec ce qu’est notre identité professionnelle, ce n’est pas une bonne chose. Et même si nous le savons personnellement, si nous ne le partageons pas, nous ne sommes pas en Église et dans un corps professionnel commun, nous ne pouvons pas nous compléter, mettre en jeu nos forces et pallier à nos faiblesses selon nos charismes respectifs ; tout le monde devra tout faire, sans qu’on sache ce qu’est « tout », et cela dans un contexte où on nous dit qu’on ne pourra plus tout faire.

« L’agapè », l’amour qui aime sans pourquoi, au niveau professionnel, a aussi besoin de la « philia », de l’amour qui aime ou n’aime pas, qui fait ou ne fait pas parce qu’il sait pourquoi.

« J’aime ou je n’aime pas ça … », il faudra argumenter.

Armin Kressmann 2017

1 Voici le mien, qui s’adresse à chaque collègue : « Vous avez un problème ? Pour que vous puissiez vous en occuper, je vous décharge dans votre travail : cultes, catéchismes, animations, aumônerie, Internet, visites de classes … tout, ou presque, même parler de votre problème, si vous le souhaitez, sauf les actes pastoraux, donc pas de services funèbres non plus. Jamais le mercredi, en principe. »

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