« La théologie est un rappel à l’Église … Par là, je voudrais d’abord entendre que la théologie rappelle l’Église à elle-même, lui remémore ce qu’elle est. Elle rappelle au pasteur et à sa communauté qu’ils ne forment pas une quelconque société avec de quelconques tendances et institutions, mais qu’ils constituent justement l’Église chrétienne. Elle rappelle à l’Église de tel ou tel pays qu’elle n’a pas le droit de conférer à sa nationalité l’honneur d’être une seconde source de révélation, qu’elle doit, elle aussi, et quel que soit le nom du peuple ou de l’État qu’elle porte, être d’abord et de façon décisive une Église “catholique” si elle veut être vraiment l’Église. Elle rappelle à l’Église de confession particulière qu’elle ne peut vouloir, dans sa propre particularité, que confesser l’Église une de Jésus-Christ, et qu’ainsi sa particularité comme telle n’est jamais qu’une exhortation permanente à rechercher l’unité de la confession. Elle rappelle à l’Église de chaque époque son apostolicité, c’est-à-dire le fait que, dans sa tentative pour se donner une nouvelle structure adaptée aux temps nouveaux, elle subsiste ou tombe dans la mesure où elle se fonde sur le témoignage biblique de la révélation, qui reste normatif aujourd’hui comme il l’était au temps des pères. Dans ses essais de structuration, l’Église est constamment et partout en danger de se perdre, de cesser d’exister comme Église. La chose se produit dès qu’elle commet le forfait de prêter une attention normative à d’autres voix qu’à celle du bon Berger, à la voix des esprits plutôt qu’à celle de l’Esprit, fût-ce par crainte pour son existence, fût-ce par témérité afin de pouvoir mieux conduire ses affaires. » (Karl Barth; L’Église, Labor et Fides 1964, p. 149, traduction d’un texte datant de 1935)